01/05/2015 : du Salar d’Uyuni au Lac Titicaca
Le Salar d’Uyuni…à 3650 m d’altitude, le plus grand désert de sel du monde, avec alternance de couches de glaise et de sel sur 40 m de profondeur. Une planéité parfaite qui laisse apparaître la courbe de notre planète. Dessus, se perdent quelques îles volcaniques plantées de cactus de plus de 10 m de haut.
Mais cet endroit protégé est menacé…Sous cette croûte de sel, se trouverait plus de la moitié des réserves de lithium de la planète…
Le début n’est pas un conte de fée…
Une piste « tôle ondulée » d’Uyuni à Colchani…1 heure 30 pour parcourir 25 km ! Une route goudronnée est en construction.
Colchani, le village des travailleurs du sel, et ses constructions et sculptures en briques de sel…
Même si l’entrée du salar est encore en partie en eau, on peut y accéder sans problème, contrairement à la mi-mars (lors de notre dernier passage à Uyuni), à la fin de la saison des pluies, où l’accès était impossible.
Une halte ensuite aux Ojos del sal, de profondes « piscines » d’où s’échappent en bulles le soufre des volcans.
Ensuite, l’immensité blanche, du blanc à perte de vue, d’où surgissent la statue du Dakar puis l’hôtel de sel Playa Blanca, construit en briques de sel tout comme son mobilier intérieur.
La croûte de sel forme par endroit de superbes motifs géométriques.
Nous arrivons à l’île volcanique Inca Huasi plantée de centaines de cactus, très touristique, où s’arrêtent tous les 4X4 d’excursion… Trop touristique.
Mais il est déjà 18h, la nuit tombe, nous décidons de bivouaquer à proximité de l’île.
Trop près apparemment, nous nous embourbons… dans un mélange de glaise, de sel et d’eau.
Là, on a vraiment joué au touriste moyen… Circuler de nuit sur le salar dont une partie est encore un peu en eau, c’était risqué…
Bis repetita placent… Cric, pelle, seau, pierres… Manu nous sort encore de là…
Le lendemain, nous décidons de poursuivre sur le salar, cette première île ne répondant pas à nos attentes de dépaysement…
A force de chercher, nous trouvons quelques traces de pneus semblant se diriger vers une grande île.
Tout d’abord, arrêt au milieu du salar… Magique… Foot, skate, vélo… Un immense terrain de jeu…
Nous reprenons la route, les enfants nous précédant en vélo. Une dizaine de kilomètres après, ils abdiquent, victimes d’un fort vent de face…Au bout de 25 km, nous approchons d’une grande île, au milieu du salar.
Nous nous « garons » à 500 mètres de l’île (notre mésaventure de la veille nous rend prudent…), et, tels des Robinson Crusoe, nous partons à la découverte de notre île…déserte.
Merveilleux… Au bout d’une heure de marche, le sommet de l’île offre une vue époustouflante sur le salar, ses chapelets d’îles volcaniques avec en toile de fond le volcan Tunupa et les sommets enneigés des Andes.
Des cactus géants tels des guetteurs semblent veiller sur ce site grandiose.
Au loin, le camping-car…
D’en haut, le salar ressemble tantôt à une vaste étendue de neige avec ses sommets enneigés, tantôt à une mer parsemée d’îles…
Un grand rendez-vous privilégié avec la nature, aussi fort que le Sud-Lipez, les baleines à Valdes…et bien d’autres.
Puis la nuit, seuls, dans cet environnement privilégié… Pas un véhicule à l’horizon, pas une trace de présence humaine (sauf quelques traces de pneu qui nous ont permis d’arriver là...)…
L’horizon est infini, la planéité parfaite, nous assistons d’un côté au coucher du soleil et de l’autre au lever de la lune, nuit de pleine lune…Sublime…
-5°C la nuit, 10°C au petit matin dans le camping-car… On ne traîne pas…On ouvre les rideaux pour faire rentrer la chaleur… On met vite à chauffer le café, le lait…
Gabriel découvre un scorpion…cristallisé dans le sel.
Puis séance photos sur le salar…
Bon, soyons fous, c’est trop merveilleux, nous décidons de continuer sur le salar vers le nord (au lieu de revenir à Uyuni)… Quelques traces de roues… Nous les suivons…
Que nous réservera la sortie du salar ? Une route goudronnée (on peut toujours rêver…) ? Une route en ripio ? Une piste en terre ? Pire, une piste avec des passages à gué ?
Les enfants profitent des derniers kilomètres sur le salar pour conduire…
Finalement, nous sortons du salar au niveau du petit village de Coqueza à 3700 m, face au volcan Tunupa. Ca passe juste au niveau de la sortie, le salar étant encore bien en eau dans cette zone.
Nous passons la nuit sur la place de l’église. Coqueza est un petit village de l’altiplano aux nombreuses maisons à l’abandon. Les habitants vivent de l’élevage de lamas et de la culture du quinoa.
Le lendemain matin, nous décidons de monter vers le volcan Tunupa pour un dernier point de vue sur le salar.
En chemin, à 3950 m, au milieu des champs de quinoa en terrasse, nous croisons une grotte…où ont été découvertes, il y a 25 ans, des momies datant de 1200 ans après Jésus Christ. Les défunts étaient placés là en position fœtale, dans un sac en laine d’alpaga ou de vigogne, avec leurs objets du quotidien pour leur vie dans l’au-delà. Apolline n’apprécie pas vraiment la scène… Ici, rien n’a bougé depuis la découverte de la grotte…
Nous poursuivons la montée, le panorama sur le salar est époustouflant, il ressemble maintenant à une mer de nuages…
Le quinoa, plante rustique par excellence, cultivé jusqu’à plus de 4000 m, colore les champs de rose-rouge. Coupée à la faux, foulée au pied puis tamisée, la petite graine de quinoa servira de base d’alimentation à la population, avec les pommes de terre et le maïs.
Ca grimpe dur, le chemin n’est même pas en lacets mais entre 2 murets délimitant des champs…
Arrivés à 4400 m, le point de vue est aussi merveilleux côté salar que côté volcan Tunupa.
Louis marque son passage par un cairn, au milieu d’autres monticules de pierres, offrandes à la Pachamama ou aux dieux de la montagne.
En fin de journée, nous quittons Coqueza en direction de La Paz.
Ca commence par de la « tôle ondulée »… puis une piste avec d’énormes pierres… Nous roulons encore une fois le long d’une route en construction. Il faut dire que la Bolivie est un vaste chantier autoroutier… Effectivement, tout est à faire...
Nous passons la nuit à Salinas Garci Mendoza puis la suivante à Caracolo, toujours sur l’altiplano à 3700m.
Nous arrivons enfin à El Alto.
Situé à plus de 4000 m, au-dessus de La Paz, cette banlieue se développe toujours avec plus d’1.2 million d’habitants. Sa population est majoritairement pauvre. Ses maisons en briques rouges s’accrochent aux collines.
Halte tout d’abord technique avec l’achat et le changement des 4 pneus arrières du camping-car qui, après 55000 km, marquent de gros signes d’usure. Les routes boliviennes ne les ont pas épargnés... Vu le prix de nos nouveaux pneus de marque, moitié prix de la France et de l’Argentine, on ne sait franchement pas d’où ils sortent…
Ensuite, lavage, plus précisément « dessalage » du camping-car, après son aventure sur le salar.
La Paz est située dans un immense amphithéâtre, étagée entre 3200 et 3870 m d’altitude et entourée de sommets de plus de 5000 m.
Elle fut fondée en 1534 par Alonso de Mendoza.
Nous y séjournons 4 jours, stationnant dans l’agréable quartier de Sopocachi, à 20 minutes à pied du centre-ville.
La Paz n’est pas la capitale de Bolivie, c’est Sucre, mais c’est le siège du pouvoir politique avec le gouvernement (Palacio de Gobierno) et le congrès (palacio Legislativo), superbes bâtiments sur la Plaza Murillo.
On remarque que les chiffres de l’horloge du Palacio Legislativo sont à l’envers. Des habitants de La Paz nous indiquent que c’est ainsi pour que les aiguilles suivent le mouvement du soleil, d’est en ouest.
Nous assistons le dimanche matin à la relève de la garde du Palacio de Gobernio.
Depuis un an, 3 lignes (roja, amarillo y verde) de teleferico ultra-moderne (plus précisément télécabines) entre La Paz et El Alto complètent le réseau de bus, permettant le désenclavement d’El Alto et améliorant la vie de ses habitants (temps de trajet réduit de 1 heure à 10 minutes aujourd’hui).
6 nouvelles lignes de teleferico sont en construction.
La construction d’un métro ou d’un tramway est rendue impossible par la configuration géographique du lieu.
Grâce au teleferico, nous sillonnons facilement les quartiers d’El Alto, ses marchés, la rue des musiciens et des costumiers…
Et c’est la première fois que nous prenons des télécabines sans les skis… quel confort !
A El Alto, ce dimanche, nous assistons à un spectacle de danse bolivienne dans les rues.
Nous faisons la connaissance de Jorge, propriétaire de pharmacies à La Paz, qui nous fournit de précieuses informations pour visiter sa ville. Féru d’histoire, nous échangeons longuement sur le sujet épineux, l’accès à la mer pour la Bolivie…. Même Napoléon n’a pas de secret pour lui…
Il rêve de parcourir l’Amérique du Sud en camping-car en famille et s’interroge sur de nombreux points techniques, que nous tentons d’éclaircir.
A La Paz, les anciennes bâtisses coloniales sont désormais cachées par les immeubles modernes.
Seule la calle Jaen, restaurée, conserve une belle homogénéité avec ses façades colorées.
L’Iglesia de San Francisco, superbe édifice colonial.
Architecturalement très hétérogène, La Paz est une ville attachante à l’image des Boliviens, propre tout comme El Alto et grouillante, où il fait bon flâner.
On trouve notamment sur les marches des foetus de lamas que les boliviens enterrent sous les fondations de leur maison pour les proteger...
Une visite au musée des instruments de musique où les enfants peuvent s’exercer sur de drôles d’instruments inventés par Ernesto Cavour Aramayo, spécialiste du charango et fondateur du musée.
Ici encore, l’essentiel du trafic routier est composé de colectivos (petits bus), de bus Dodge et de taxis.
Passage obligé pour les garçons, le stade de foot...
Et ce dimanche matin, une longue fille d’attente s’étend devant les guichets.
Renseignements pris, à 17h30, se déroulera un match important, Bolivar (1 des 2 équipes de La Paz avec The Strongest) contre San Jose (équipe d’Oruro).
Si Bolivar gagne, ils seront champions de Bolivie (aux points), même si le championnat de Bolivie n’est pas terminé.
Après une petite heure d’attente au milieu des supporters de Bolivar, j’obtiens enfin les précieux sésames pour assister au match avec les garçons. Manu et Apolline optent pour une ballade dans les rues de La Paz…
Nous avons des places dans la « curva norte » (l’équivalent du virage sud des girondins…) au milieu des supporters de Bolivar.
Ambiance délirante : chansons, confettis, musique … Un stade complet, 45000 spectateurs… Un drône-caméra filme les spectateurs…
Finalement, Bolivar gagne 1 à 0… Bolivar campeón… Remise de la coupe et grande fiesta dans les rues de La Paz.
Nous quittons enfin La Paz pour rejoindre San Pablo de Tiquina au bord du lac Titicaca.
Mythique lac Titicaca, 8400 km2, plus haut lac navigable du monde à 3812 mètres d’altitude, 45% du lac appartient à la Bolivie, 55% au Pérou.
De San Pablo, de grandes barges en bois assurent la traversée du lac des véhicules vers San Pedro de Tiquina, en face. Les passagers prennent un des nombreux petits bateaux de traversée. En effet, de l’autre côté du lac, c’est encore la Bolivie, une petite enclave cernée par le Pérou, avec notamment la ville de Copacabana, grand centre religieux bolivien.
Mine de rien, ces barges en bois propulsées par un moteur de 40 CV, peuvent transporter jusqu’à 80 tonnes…78 barges postées à San Pablo et 35 en face à San Pedro. Chaque barge est numérotée et appartient à un propriétaire. Le transport est assuré à tour de rôle pour maintenir l’équité.
Le soir, nous dégustons une spécialité locale, la « trucha », truite du lac Titicaca. Franchement délicieuse…
A défaut d’accès à la mer, l’armada bolivienne est ancrée sur le lac Titicaca.
Le lendemain, nous embarquons pour la traversée du lac, environ 15 minutes. Le propriétaire nous autorise à rester sur la barge du véhicule. Par manque de fond, la barge se manœuvre au départ et à l’arrivée avec une perche en bois.
Nous voilà à San Pedro de Tiquina, où nous rencontrons une famille française de Savoie, avec laquelle nous échangeons de nombreuses informations. Bonne continuation à vous les Lillibussiens…
Après d’excellents jus et milk-shake aux fruits, nous partons vers Copacabana. La route offre de superbes panoramas sur les eaux bleu profond du lac Titicaca et les sommets enneigés des Andes.
A 3840 m d’altitude, Copacabana fut fondée par l’inca Tupac Yupanqui afin d’accueillir les pèlerins qui se rendaient à la Isla del Sol, considérée au XVème siècle comme le lieu de naissance du Soleil, de la Lune et de la dynastie inca, avec leurs ancêtres mythiques, Manco Capac et Mama Ocllo.
La cathédrale de Copacabana d’un blanc intense réhaussé d’azulejos, héberge la statue de la Virgen de la Candelaria, la Vierge Noire, surnommée la Reine de Bolivie car elle est l’image la plus sacrée du pays. Des centaines de cierges et de bougies brûlent en permanence en son honneur.
En février et en août, des milliers de pèlerins débarquent de tout le pays pour lui rendre hommage.
Rituel surprenant sur le parvis de la cathédrale, tous les jours, des fidèles viennent faire bénir leur véhicule (voiture, camion, bus…) décoré de guirlandes et rubans colorés et aspergé d’eau bénite par le prêtre…
En fin d’après-midi, nous gravissons les escaliers du Cerro Calvario (3966 m), colline en forme de pain de sucre qui offre une superbe vue sur les eaux du lac Titicaca et sur Copacabana.
Le rituel veut qu’on dépose un caillou sur chacune des 14 stations du Chemin de Croix.
Pour la petite histoire, on doit le nom de la célèbre plage de Rio de Janeiro à un moine bénédictin natif de Copacabana en Bolivie, en perdition en 1745 au large du Brésil, et qui promit que, s’il échappait au péril, il donnerait le nom de son village à l’endroit il échouerait…
En route maintenant pour la frontière avec le Pérou à une dizaine de kilomètres de Copacabana.
Après la douane et l’émigration boliviennes, nous pensions en avoir fini avec les formalités…
Mais c’était sans compter sur une ultime tentative de corruption de la police bolivienne…
Après nous avoir encore demandé les extincteurs et les triangles (ce qui nous fait bien rire car les boliviens ne possèdent pas de triangles et quand ils sont en panne, ils positionnent à quelques mètres de leur véhicule des tas de branchages ou de pierres pour signaler l’obstacle !!!), ils nous indiquent que le tampon de sortie du territoire par la Police est indispensable et, bien sûr, nous le monnayent. Sachant que ce n’est pas vrai, nous la jouons cette fois-ci par un « no comprendo, gracias, adios » + énorme sourire et départ rapide…
Hormis ces fausses notes de la police bolivienne, corruption lors de 2 contrôles sur 10, les autres contrôles se sont déroulés avec des policiers franchement intègres et cordiaux.
La Bolivie est un véritable coup de cœur, une population accueillante et chaleureuse et de superbes paysages extrêmement variés.
Nous y avons séjourné 2 mois et apprécié aussi bien ses grandes villes comme Sucre et La Paz que ses villages authentiques de l’Altiplano notamment.
Les boliviens ne viennent pas spontanément vers nous mais nous interpellent en permanence pour engager la conversation.
Louis avec sa chevelure blonde, « el rubio », les a fait craqués… Comme dans les pays précédents, c’est à chaque coin de rue, une caresse ou un massage de ses cheveux… et souvent une photo…
Le tourisme est encore balbutiant et désorganisé (ce qui en fait son charme !) mais ce superbe pays a tout l’avenir devant lui…
Par contre, nous avons ressenti une extrême pauvreté, plus visible dans les campagnes qu’en ville, malgré une politique dynamique du président actuel pour l’endiguer.